mercredi 31 octobre 2018

SÉRIE / Queer Eye


Karamo, Jonathan, Bobby, Tan et Antoni : cinq personnes qui vont changer votre vie. Non, j'exagère à peine quand je parle de ceux qui se surnomment, à juste titre, les "Fab Five" ! Car aujourd'hui, je viens vous faire découvrir une série pas comme les autres, qui s'apparente même plutôt à une émission de télé-réalité. Il s'agit d'une équipe qui va partir à la rencontre d'un homme, dans le but de faire une "intervention" pour l'aider dans les divers champs de sa vie (familial, professionnel, physique etc.). Attendez, ne fuyez pas tout de suite ! Si je vous parle de "Queer Eye", c'est que malgré le pitch présenté, on est loin des émissions que l'on connait tous. Ici, pas de jugements hâtifs, pas de critiques gratuites, ni de pseudo conseils mode à suivre comme une religion...


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A vrai dire, si je ne devais retenir qu'un seul mot pour décrire cette série, ce serait  : BIENVEILLANCE. Grâce à la personnalité de chacun et au lien de confiance tissé, les hommes qu'ils viennent aider en arrivent à se livrer sur les raisons pour lesquelles ils se retrouvent dans leur situation actuelle. Car s'il y a bien deux choses dans lesquelles les Fab 5 excellent, c'est bien l'écoute et l’empathie. Ils prennent vraiment le temps de comprendre comment fonctionnent les personnes, afin de leur proposer des solutions adaptées, et non de leur plaquer quelque chose qui ne leur ressemble pas. Bien qu'il y ait des conseils pour se mettre en valeur physiquement, notamment grâce à Tan, l'expert en mode, c'est loin d'être le seul domaine dans lequel ils interviennent. Antoni aide en cuisine, Karamo s'occupe de l'aspect culture, Bobby gère la décoration et Jonathan la partie soin/beauté.

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"Queer Eye" c'est aussi une grande leçon de tolérance. Ne vous méprenez pas, il ne s'agit pas d'une émission exclusivement autour de l'homosexualité, car en réalité la plupart des "candidats" sont hétérosexuels. Mais justement, il s'agit de combattre les préjugés et d'arrêter de vouloir coller des étiquettes à tout prix. Les Fab 5 viennent bousculer les représentations autour de la masculinité. Oui, on peut être un camionneur viril de 40 ans et se faire un petit masque hydratant une fois par semaine ! C'est d'ailleurs aussi l'occasion de partir à la rencontre du cliché de "l'américain de base", car les épisodes se déroulent exclusivement en Georgie, dans des villes qui sont souvent loin du bling bling et des paillettes. "Queer Eye" nous livre donc un portrait brut du rapport aux genres aux Etats-Unis.

Au delà du genre, l'émission en vient aussi à traiter d'autres sujets forts, comme le racisme. D'ailleurs, s'il y a bien un seul épisode que je devrais vous convaincre de regarder, ce serait l'épisode 3 de la saison 1. Sans trop vous en dire, les Fab 5 partent intervenir auprès de Cory, un policier georgien blanc. Or, il se trouve que Karamo va engager des discussions avec lui, notamment à propos des injustices et tueries policières envers les personnes noires. Je ne vous en dis pas plus, seulement que ces 50 minutes viennent résumer tout ce que j'aime à propos de cette série. Ne m'en voulez pas si vous en ressortez avec les yeux humides... 

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Enfin, dernier point, qui n'en n'est pas le moins important, "Queer Eye" est avant tout très drôle. A moins d'être une porte de prison, cela risque d'être difficile pour vous de ne pas avoir le sourire aux lèvres pendant une grande partie des épisodes. Les Fab 5 ne se prennent pas la tête et n'ont que faire du regard des autres, ils adoptent donc une attitude décomplexée et n'hésitent pas en faire des caisses pour amuser la galerie ! A ce sujet, je tiens à attribuer une mention spéciale à Jonathan, qui excelle en la matière (même si mon coeur bat avant tout pour Karamo et Antoni... ♥) :

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Bref, vous l'aurez compris, je viens tout juste de terminer la saison 1 et c'est déjà un gros coup de coeur. Même si j'ai déjà entendu parler de cette série sur internet, notamment grâce au chouette article de Madmoizelle qui me l'a fait découvrir, "Queer Eye" ne me semble pas très répandu autour de moi. Et comme Fab le mentionne si bien dans son article, si vous êtes un homme hétéro, regarder ce show c'est aussi l'occasion de sortir de votre zone de confort. Du coup, je me sens dans le devoir de vous partager cette série feel good, qui me semble d'une utilité publique pour s'ouvrir l'esprit et combattre les clichés ! Donc, dites moi si vous connaissez déjà les Fab 5 et quel est votre avis dessus. Et n'hésitez pas à me faire part de vos impressions sur la saison 2, même si je sais d'avance que je vais la regarder dans tous les cas ;)

Joyeux Halloween à tous !
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mardi 23 octobre 2018

"Dans les bois" d'Harlan Coben


"J'ai essayé de m’exhorter à la prudence. De me rappeler que l'espoir était le plus traître des compagnons, qu'il pouvait vous broyer l'âme comme une coquille de noix vide."


Il ne m'aura fallu que quelques pages pour être absorbée pleinement par les bois, sortis tout droit de l'imagination d'Harlan Coben. Figure incontestée du thriller et du roman policier, je ne pense pas avoir besoin de présenter cet auteur, dont les dernières publications occupent toujours une bonne place en tête de gondoles. Pour ma part je ne suis pas une fervente lectrice d'Harlan Coben. J'avais beaucoup apprécié "Ne le dis à personne" mais le dernier lu, "Remède mortel", m'avait donné une impression de déjà vu. Je l'avais donc un peu laissé de côté, jusqu'à ce que, en constituant ma PAL du Pumpkin Autumn Challenge, je retombe sur "Dans les bois", qui traînait dans ma bibliothèque depuis déjà un long moment. 


"Été 1958, New Jersey. Paul Copeland est animateur d'un camp de vacances à la lisière des bois. Une nuit, il abandonne quelques heures son poste. Quatre jeunes en profitent pour s'éclipser, dont sa sœur Camille. On ne les reverra plus. Seuls deux corps sont retrouvés. On attribuera leur mort à un tueur en série qui sévissait dans la région. Vingt ans plus tard. Paul est devenu procureur. Alors qu'il plaide dans une affaire de viol, il est appelé à identifier un corps. Stupéfait, il reconnaît formellement Gil Perez, un des disparus. Pourquoi les parents de Gil s'obstinent-ils à nier son identité ? Et si Gil a été en vie tout ce temps, se pourrait-il que Camille le soit toujours aujourd'hui ? Bien décidé à faire la lumière sur le drame qui n'a jamais cessé de le ronger, Paul va replonger dans les souvenirs de cette terrible nuit...". 

Ce roman commence à dater, puisqu'il a été publié en 2009 aux éditions Pocket. Alors certes, ce n'est pas de la grande littérature, il n'y a pas de figures de style transcendantes ni de vocabulaire très élaboré. Harlan Coben va à l'essentiel, dans un style efficace qui nous entraîne directement dans les nombreuses péripéties vécues par ses personnages. J'attendais une évasion de quelques heures et des rebondissements inattendus, et de ce côté là j'ai été servi. Sur les derniers chapitres je n'ai clairement pas pu lâcher le roman, obsédée par le désir de connaître le dénouement. 

Basiquement, mon état émotionnel sur les cinquante dernières pages :

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"La mort est comme un coup de masse, de la destruction pure. Elle frappe, vous êtes terrassé, vous vous relevez pour reconstruire. Mais ne pas savoir – le doute, le flou –, c'est un peu comme l'action des termites ou d'un germe insidieux. Ça vous ronge de l'intérieur. On ne peut pas empêcher la pourriture de proliférer. On ne peut pas reconstruire car la mort continuera son érosion."

Ce que j'ai particulièrement apprécié dans ce thriller, c'est l'épaisseur du personnage principal Paul Copeland. Par épaisseur j'entends par là que j'avais vraiment l'impression d'enlever peu à peu chaque couche qui façonnait sa personnalité. Le fait de le suivre, en parallèle de l'enquête sur la disparition de sa sœur, dans son quotidien en tant que procureur, rend notre attachement et notre compréhension du narrateur plus facile. Car si Harlan Coben approfondit bien quelque chose, c'est les valeurs morales des différents protagonistes. Ici, au delà d'un drame familial, il s'agit surtout de déceler ce dont l'humain est capable pour survivre et protéger les siens. 

On découvre également toute la réalité de la mécanique judiciaire, que ce soit à travers le rôle de chacun (juge, procureur, juré, avocat...) ou de la description précise d'un procès pour viol d'une prostituée dans une fraternité élitiste du comté. J'ai ainsi retrouvé la dimension de spectacle qui se joue lors d'une audience pénale. Pour avoir assisté à plusieurs procès, la manière dont l'auteur le décrivait m'a semblé particulièrement juste et réaliste. J'ai retrouvé sans peine l'ambiance du tribunal et les questionnements autour de la notion de Justice. 

"Traitez-moi d’hypocrite - je ne dirai pas le contraire -, mais l’aveuglant soleil du monde réel brouille parfois la frontière entre le bien et le mal."

J'ai donc trouvé ici un élément que j'apprécie particulièrement dans ce genre littéraire, il nous fait sortir d'une vision manichéenne de l'être humain. Chacun est susceptible de basculer dans l'horreur, dans l'irréparable. Une action, un mauvais choix, une rencontre hasardeuse et voilà que nos beaux principes moraux volent en éclats. Alors dites moi, jusqu'où iriez vous pour protéger ceux que vous aimez ? 

dimanche 21 octobre 2018

"Le trop grand vide d'Alphonse Tabouret" de Sibylline, Capucine et Jérôme d'Aviau




"Ils étaient le miroir de leurs attentes, la petite musique de leur page à tourner, 
la lucarne de leur toit pour regarder les étoiles."


Est ce que vous vous fiez beaucoup à votre instinct dans le choix de vos lectures ? Pour ma part oui, même si j'apprécie une sélection basée sur un repérage préalable, en fonction de mes goûts et des avis lus. Hier, je suis tombée par hasard sur cette BD, dont la couverture et le nom m'ont beaucoup intrigué. Alors, j'ai retourné le livre et ait découvert la quatrième de couverture : "Au milieu d'une forêt tendre, dans une clairière de rien, un tout petit machin se réveille mais ne se souvient pas."


Encore plus intriguant n'est ce pas ? Avec une telle phrase comme accroche, je dois bien avouer que ma curiosité était piquée et que je me demandais bien ce qu'était ce fameux petit machin au nom d'Alphonse Tabouret. Le thème de la forêt m'a également intéressé, puisqu'il me donnait l'occasion d'ajouter une lecture au menu "Automne Enchanteur" du Pumpkin Autumn Challenge. Ni une ni deux, quelques minutes plus tard je parcourais les premières pages et entrait dans l'histoire avec une avidité inattendue.

Pour apporter quelques précisions, l'ouvrage est paru aux éditions Ankama en septembre 2010. Le dessin, uniquement en noir et blanc, est à la fois précis est épuré. Une attention toute particulière est accordée à l'expression émotionnelle des personnages, ce qui renforce l'intérêt des dialogues. Je ne connaissais pas du tout le travail de ces trois auteurs/illustrateurs, mais ces planches me donnent envie de me pencher plus le sujet car j'ai beaucoup aimé leur univers. 


Je pourrais vous faire de longues phrases soigneusement réfléchies et concrètes sur le contenu de cette BD. Mais ce serait en gâcher l'effet. Ce que je peux vous dire en revanche, c'est qu'il s'agit d'une lecture emprunte de poésie et d'innocence. Tout au long des 208 pages, nous suivons l'aventure pas si banale d'un petit machin qui découvre la vie dans tout ce qu'elle a de plus normale. A travers des rencontres, des expériences et des obstacles, il va peu à peu appréhender ses émotions et chercher un sens à son existence. A la fois pleine d'innocence et de justesse, "Le trop grand vide d'Alphonse Tabouret" me fait penser à une confiserie qu'on déguste avec délectation et dont on garde longtemps le goût en bouche. Il s'agit donc, vous l'aurez compris, d'un coup de coeur foudroyant et instantané, que je vous recommande chaudement. Sur ce court article, je vous laisse avec quelques extraits illustrés, qui seront plus parlants que mes mots.



vendredi 12 octobre 2018

"Les sorcières du Clan du Nord" (tome 1) d'Irena Brignull



"- Et un jour, tu iras plus loin ?

- Non
- Pourquoi ?
- Parce que ce n'est pas au nombre de mes pas que je mesure le voyage de ma vie."




Voici déjà ma 4ème lecture du Pumpkin Autumn Challenge terminée ! Quand j'ai vu le menu "Automne Ensorcelant", avec ses différentes catégories autour du monde magique et de la sorcellerie, je n'ai pas mis longtemps à remettre le doigt sur ce titre qui traînait depuis plusieurs mois dans ma PAL. J'ai d'ailleurs vu que j'étais loin d'être la seule car de nombreux participants au challenge ont partagé aussi cette lecture. 

Voici ce que nous annonce la quatrième de couverture :
"Poppy, adolescente rebelle, se fait renvoyer de tous les lycées qu'elle fréquente. L'innocente Clarée a du mal à se faire accepter par sa communauté secrète de sorcières. Leurs chemins n'auraient jamais dû se croiser. Pourtant, elles deviennent inséparables. Et la rencontre avec le mystérieux Leo achèvera de bouleverser leurs destinées. Mais y a-t-il une frontière entre magie et réalité ?"

A priori ce n'est pas le genre de romans vers lequel je me serais spontanément tourné, mais j'avais lu beaucoup de critiques positives à son sujet. Avec "Les Sorcières du Clan du Nord - Le sortilège de minuit", Gallimard Jeunesse édite un renouvellement du genre (même s'il me paraît difficile de comparer ce début de saga à celle d'"Harry Potter"...). Irena Brignull arrive à dépoussiérer le monde des sorciers, n'hésitant pas à accorder autant d'importance à la société des Ivraies (les personnes dépourvues de magie) afin d'entremêler les problématiques communes des personnages. On se retrouve ainsi face à deux mondes qui entrent en collision suite à une prophétie et à une rencontre fortuite de deux jeunes filles dans un vallon. 

Il y a assez peu de personnages, puisque les principaux sont Poppy, Clarée et Leo. Ensuite, ce sont majoritairement des membres de leurs familles qui gravitent autour  d'eux en second plan. L'auteur a ainsi fait un choix qui laisse une large place pour approfondir les personnalités de chacun, leurs histoires et leurs aspirations. On s'attache donc rapidement à ces trois protagonistes qui ne trouvent pas leur place dans le monde et essaient de survivre tant bien que mal au gré de leurs blessures. J'ai trouvé très intéressant et audacieux qu'Irena Brignull fasse le choix, pour un roman jeunesse, d'un personnage mineur vivant à la rue. Bien qu'il n'y ait pas de détails glauques ou de scènes choquantes, à travers Leo, elle pose des mots simples et sans détours sur ses conditions de vie précaires. J'ai été également surprise de voir le sujet de la dépression post-partum abordé de front à travers Mélanie, la mère de Poppy.        

"L'amour de sa mère était comme une couverture douillette, dont la chaleur empêchait le mépris de glacer son coeur."

Ce premier tome est donc une belle surprise qui m'a offert une plongée rapide et intense dans une atmosphère de magie. Sans surprise, on retrouve une écriture simple et efficace, adapté à la lecture des plus jeunes. Je l'ai lu en seulement quelques jours, et encore, c'est parce que je devais me freiner pour ne pas dévorer trop de pages d'un coup ! Les derniers chapitres m'ont particulièrement happé et donné envie de rapidement me diriger vers le deuxième tome. 
Après une petite recherche sur l'auteur, j'ai appris qu'elle avait notamment écrit la très belle adaptation cinématographique de l'un de mes livres préférés : "Le Petit Prince". Au vue de la richesse des détails et de la fidélité à l'univers de St-Exupéry, je ne suis pas surprise d'avoir de nouveau plongé aussi facilement dans les nouvelles frasques imaginaires d'Irena Brignull.  


"J'ai peur de tous ceux qui ont le coeur habité par la haine."

Il y a quand même quelques petits points noirs dans cette lecture qui méritent d'être soulevés. J'ai notamment trouvé que les histoires d'amour autour de Leo prenaient trop de place. Il y a des moments où le côté naïf des protagonistes ressortaient beaucoup, au point de leur faire perdre un peu de consistance à mes yeux. J'ai aussi ressenti un peu de frustration car j'aurai aimé avoir plus de détails sur l'origine et l'histoire de ce clan de sorcières et même sur l'organisation de la communauté. Bien qu'on en ait un aperçu, il me semble que du contenu supplémentaire à ce sujet serait venu épaissir un peu l'histoire. Cependant, au vue des scènes finales de ce premier tome, j'ose espérer que la suite m'apportera de quoi me mettre sous la dent.


Voilà pour cette nouvelle chronique, n'hésitez pas à commenter si vous l'avez lu ou que vous avez justement déjà un avis sur le deuxième tome. Bon week-end à tous ;)

vendredi 5 octobre 2018

"ÇA" de Stephen King

"Viens voir les paysages, prends un ballon, viens nourrir les éléphants et descendre le toboggan !
Ben, oh, Ben, comme tu vas flotter !"



De Stephen King, je n'avais lu, jusqu'ici, que l'effroyable "Jessie", qui me laisse encore des frissons deux ans après, et la nouvelle "Le singe", qui m'avait laissé sur ma faim. Puis, comme tout le monde je pense, je n'ai pas échappé à l'engouement médiatique autour de la sortie au cinéma de "ÇA" en 2017. J'ai alors vu le film, qui m'a franchement déçu et pour lequel je n'ai pas vraiment éprouvé d'intérêt, hormis autour de l'univers. Mais, voulant persévérer dans ma découverte de Stephen King et intriguée par le fait que "ÇA" avait déclenché pas mal de coulrophobie à travers le monde, j'ai décidé de m'attaquer au livre. Cette lecture sanglante validait par la même occasion mon premier menu du Pumpkin Autumn Challenge dont l'article est à retrouver ici.

source : weheartit
Pour ceux qui auraient brillamment réussi à ne pas croiser le chemin de Grippe-Sou le clown, voici le résumé de ce premier tome :
"Enfants, dans leur petite ville de Derry, Ben, Eddie, Richie et la petite bande du « Club des ratés », comme ils se désignaient, ont été confrontés à l’horreur absolue : ça, cette chose épouvantable, tapie dans les égouts et capable de déchiqueter vif un garçonnet de six ans…Vingt-sept ans plus tard, l’appel de l’un d’entre eux les réunit sur les lieux de leur enfance. Car l’horreur, de nouveau, se déchaîne, comme si elle devait de façon cyclique et régulière frapper la petite cité."

Vous l'aurez compris avec ces quelques lignes, le récit prend pied à deux époques : lors de l'enfance, puis à l'âge adulte des sept personnages principaux que constitue le club des ratés. Sauf que malheureusement ce n'est pas si simple, car en réalité Stephen King va nous embarquer dans un melting pot chronologique au niveau de la narration. Le but ? Retracer l'historique sanglant de la ville de Derry, afin de démontrer que, tous les vingt-sept ans, des événements terribles se déroulent dans une inlassable répétition morbide. La démarche est intéressante car cela nous permet de vraiment nous imprégner de l'atmosphère de l'histoire et de développer un univers plutôt riche. Sauf que, pour moi, c'est aussi un gros point noir dans cette lecture. A force de faire des apartés, des retours en arrière, d'insérer des récits de souvenirs au milieu de passages eux-mêmes basés sur des souvenirs d'enfance, on a tendance à s'y perdre. 

Ce qui m'amène à un deuxième point négatif : la multiplication des personnages. L'auteur a déjà fait le choix d'avoir pas moins de sept personnages principaux, autour duquel il fait en plus graviter un grand nombre de personnages secondaires. Cet élément et les basculements temporels incessants m'ont clairement freiné dans ma lecture, car j'avais l'impression d'être face à un récit haché et il m'était difficile de percevoir où Stephen King voulait en venir. De plus, ce qui est étonnant c'est que j'ai vraiment constaté une distinction entre les parties qui se déroulaient en 1957 (enfance) et celles de 1985 (adultes). Cette dernière m'a beaucoup plus intéressée et j'accrochais vraiment au récit. Car, on ne peut pas lui retirer ça, l'auteur brosse une galerie de personnages passionnants. Il prend le temps de décortiquer leurs personnalités, leurs failles, leurs émotions, et l'histoire n'en n'est que plus prenante et enrichit. 


"Je me sens comme doit se sentir un oiseau migrateur quand vient l'automne..il sait obscurément qu'il doit retourner chez lui. C'est l'instinct vois-tu..et quelque chose me dit que l'instinct est comme le squelette de fer qui se cache sous toutes nos idées et notre libre-arbitre"

Ainsi, plus on apprend à connaître Derry et ses habitants, et plus on a l'impression de basculer dans un huit-clos qui nous plonge peu à peu dans cette ville étouffante et angoissante. "ÇA" vient puiser dans la peur de chacun et s'en imprègne afin de la matérialiser. C'est aussi ça que j'ai trouvé dommageable dans cette lecture, alors que le concept en lui-même est vraiment très intéressant. Finalement on se retrouve avec, non pas un clown tueur, mais encore une fois toute une galerie de monstres et personnages horrifiques qui apparaissent sous de multiples formes. Résultat, j'ai eu du mal à adhérer à ces métamorphoses, qui étaient bien souvent beaucoup trop furtives et qui, en se multipliant, perdaient en crédibilité. Le temps que la pression monte au fil des phrases, ÇA avait déjà disparu, et les longues descriptions reprenaient...



Vous l'aurez compris, contrairement à ce à quoi je m'attendais, ce livre ne m'a pas empêché de dormir ni fait faire de cauchemars horribles. J'ai plutôt eu l'impression d'une lecture en dents de scie, avec des moments haletants où tout s'accélère, et brusquement de longs passages plats, mêlés à des histoires dont on ne justifie pas trop la présence sur le moment. Pour moi, on pourrait facilement couper 300 pages, sans que cela n'entache fondamentalement le récit (pour ceux qui l'ont lu, s'il vous plaît dites moi que je ne suis pas la seule à avoir trouvé terriblement longues les dizaines de pages sur la construction du barrage !). Bizarrement, j'ai beaucoup aimé le début et la fin du roman, mais tout le milieu m'a semblé être interminable. Finalement, deux mots me sont ainsi venus régulièrement en tête au fil de ce tome 1 : frustration et déception. J'attendais peut-être trop de "ÇA" et j'avais encore en tête ce que Stephen King avait réussi à me faire ressentir à la lecture de "Jessie". J'ai donc l'impression d'avoir eu en main plein de bons éléments, d'avoir côtoyé un univers très prometteur, et pour autant il me manque cette grosse pièce du puzzle qui m'aurait permis de vivre cette lecture à 200%.  Les ressentis vécus pendant la lecture sont généralement un bon indicateur d'évaluation pour moi, or là sur près de 800 pages je n'ai pas eu à affronter beaucoup d'émotions... 

"Des lumières s'allument sous son crâne, des projecteurs puissants. Comme s'il était resté assis vingt-sept ans dans l'obscurité d'un théâtre, à attendre que quelque chose se passe et que finalement le spectacle commençât." 


Je ressors donc avec un avis très mitigé sur ce premier tome de "ÇA", mais pour autant je ne ferme pas la porte au deuxième tome. Car le récit s'arrête vraiment au milieu d'une histoire qui a une continuité, donc je suis un peu curieuse de savoir ce que réserve la suite. A ce sujet, je vous invite d'ailleurs à aller voir la vidéo de Lemon June, qui a un avis assez différent du mien sur ce livre et qui apporte un regard plus large, puisqu'elle a lu le deuxième tome. Sa critique m'a permis de me rebooster dans ma lecture et d'envisager de lire le second roman. Mais on ne va pas se mentir, ce ne sera pas pour tout de suite !


Que vous ayez lu les livres ou vu les films, faites moi part de vos avis sur "ÇA". Et surtout dites moi ce que vous pensez de Stephen King et si vous avez d'autres titres à me conseiller pour reprendre du bon pied avec lui ;)