lundi 13 avril 2020

"Sale gosse" de Mathieu Palain


"Leur faire entendre qu'en rentrant dans le rang ils éviteraient la taule ou le cimetière, c'était comme crier dans le désert. A quatorze ans, la mort, ils n'y croyaient plus."


Pour ce nouvel article, on reste dans la thématique du précédent, sur l'adolescence et la délinquance. Cette lecture est une surprise totale car il s'agit d'un livre qu'on m'a offert à Noël dernier. Heureusement, j'ai un entourage qui me connaît bien et qui n'est pas tombé à côté de la plaque avec cet ouvrage ! Et pour cause, il y est question de travail social, de parcours chaotiques et de rencontres qui peuvent changer le cours d'une vie. 

Je ne connaissais absolument pas Mathieu Palain, cet auteur, qui signe avec "Sale Gosse" son premier roman. L'histoire qu'il raconte, c'est celle de Wilfried, un jeune qui subit, dès son plus jeune âge, le poids de son environnement familial. Placé dans une famille d'accueil, car sa mère ne peut pas s'occuper de lui, il se reconstruit petit à petit auprès de ces adultes aimants de substitution. Alors qu'un parcours professionnel dans le football se dresse devant lui, grâce à son talent et à son travail, tout bascule quand il décide de laisser s'échapper la colère qui dormait en lui. Il a 15 ans, et une suite d'évènements vient alors remettre en question ses repères et le replonger dans les failles liées à son histoire de vie. La délinquance lui tient alors les seuls bras qu'il est en mesure de saisir à ce moment là. Pourtant, Nina, une éducatrice de la Protection Judiciaire, croit en lui et ne compte pas lâcher ce jeune au potentiel certain. 

"Le foyer, c'est le cinéma, et le milieu ouvert, la photographie. Un film, tu le vis à je ne sais combien d'images par seconde, et l'histoire t'embarque. La photo, elle reste figée, mais à force de la regarder, tu perçois les détails, le second plan. Le milieu ouvert, c'est ça : tu as l'impression d'avoir perdu le contact, alors qu'en fait tu as pris du recul pour comprendre ce que tu regardes."

Ce que j'ai le plus apprécié dans ce roman, sans nul doute, c'est son réalisme. Le contexte de travail des éducateurs de la PJJ, les parcours des jeunes qu'ils accompagnent, sont criants de vérité. En lisant ces pages, j'avais vraiment l'impression d'être au travail. Mathieu Palain ne cherche pas à l'idéaliser ni à épargner le lecteur par rapport à la réalité de ces personnages, qu'on pourrait aisément croiser dans nos accompagnements éducatifs. Pour cela, l'auteur s'est largement inspiré du vécu de son père, lui même éducateur, et de sa propre immersion de six mois au sein de la PJJ d'Auxerre. 

Cet ouvrage se dévore très rapidement et est très accessible. Pour être tout à fait honnête, habituellement je n'aime pas trop les livres avec un langage "parlé" et des termes très familiers. Mais ici, le style littéraire employé est maîtrisé et renforce le réalisme des scènes racontées et des personnages. Ce choix me semble au contraire très intéressant car je pourrais tout à fait imaginer faire lire "Sale Gosse" à un adolescent au même profil que Wilfried. A mon sens, ce livre peut donc servir de support professionnel, dans notre métier, et venir alimenter nos réflexions éducatives. Il peut même venir réveiller des vocations chez certains, qui sait ? ;)

"L'avenir, vous pouvez le prendre par tous les bouts, face à un gamin de seize ans qui a décidé de vivre au jour le jour, c'est un mot qui ne veut rien dire."

Pour plus de recommandations de lecture en lien avec le travail social, je vous invite à consulter ma rubrique consacrée à cet effet. N'hésitez pas à donner votre avis en commentaires :) 

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